Présentation du film par Pascal Taranto
« La nature imite l’art beaucoup plus que l’art n’imite la vie ». Cette phase fameuse d’Oscar Wilde dans son essai « Eloge du mensonge » peut nous servir de fil conducteur pour une lecture du film de Tarantino « Pulp Fiction ». Le cinéma de Tarantino n’imite pas la nature : il brise au contraire le fil du récit, multiplie les fausses pistes, les situations absurdes et les dialogues byzantins, et c’est comme cela qu’il a surpris le public et la critique au point de se voir décerner en 1994 la Palme d’Or au Festival de Cannes et l’année suivante l’Oscar du meilleur scenario original. Mais ce que donne à voir le film, à travers les tribulations de ses personnages plus ou moins grotesques et sympathiques, ce n’est autre que la vie elle-même, et son scenario hasardeux et sans consistance. Le récit plein de sens que nous voudrions nous faire de nos existences n’est-il pas une belle histoire que nous nous racontons, constamment démentie par l’ironie du sort ? Et si la vie n’était rien d’autre qu’une Pulp Fiction, une histoire à deux balles ?
Pascal Taranto
Professeur des universités (Université Aix-Marseille). Spécialiste d’histoire de la philosophie anglaise (Locke, Hume, Berkeley, Toland, Collins).